Est-il nécessaire qu’un non-résident octroie testament ?- Règlement Européen pour les Successions Internationales.
09 décembre 2015Successions
« Le 17 août 2015 prochain commence l’application du Règlement nº650/2012 du Parlement Européen et du Conseil, et qui régule, entre autres, les successions mortis causa internationales ».
1) Introduction.
1.1) Le 17 août 2015 prochain commence l’application du Règlement nº650/2012 du Parlement Européen et du Conseil, et qui régule, entre autres, les successions mortis causa internationales.
Comme indiqué dans l’exposé des motifs ou considérants, cette norme a pour objectif garantir la libre circulation des personnes grâce à l’élimination d’obstacles sur la Planification et l’Organisation de leurs successions, consolidant ainsi les principes de liberté, sécurité et justice de l’Union Européenne.
1.2) La différence dans la régulation de la succession mortis causa qui existe entre les diverses Etats Membres de l’Union Européenne (connu comme « Loi Matérielle ») est évidente, étant en outre une matière sur laquelle l’Union Européenne ne peut intervenir, étant c’est une compétence de chaque Etat.
Par exemple, en Angleterre et au Pays de Galles régit le principe de « liberté de tester », face auquel il existe quelques particularités par rapport au conjoint ou aux enfants exclus de l’héritage et dépendant économiquement du décédé, ou encore un système de légitimes en rapport avec les biens meubles qui s’envisage en Écosse.
En Espagne, cependant, il existe des limitations à la liberté de tester à travers du dénommé système de légitimes, qui oblige au testateur à réserver une parte de l’héritage à des héritiers déterminés.
1.3) Mais le vrai problème surgit avec la disparité des normes de conflit qui s’établissent, en matière de succession, dans les Etats Membres de l’Union Européenne (connu comme « Loi de Conflit »), c’est-à-dire, que la Loi est appliquée à la succession mortis causa. Ledit problème s’accroit quand le défunt a des biens dans divers pays.
Ainsi nous observons qu’en Espagne ou en Allemagne régit le « principe d’unité de la succession », c’est-à-dire, l’application de la même Loi à toute la succession. En Espagne, par exemple, la Loi national (nationalité) du défunt s’applique à tout son héritage.
Dans d’autres pays comme la France ou le Royaume Unis régit au contraire le « principe de fractionnement », c’est-à-dire, la Loi à appliquer dépendra de plusieurs critères. Au Royaume Unis, par exemple, il existe une dualité normative selon qu’il s’agit de biens meubles ou immeubles, de façon que la succession des biens immeubles est régit par la Loi du pays où ils sont situés, et celle des biens meubles par la Loi du dernier domicile du défunt. Nous signalons que le concept de « domicile » au Royaume Unis ne coïncide pas avec celui de la résidence habituelle, puisque selon la législation anglaise, un britannique peut avoir sa résidence habituelle dans un pays étranger, mais maintenir un lien avec son pays d’origine. Cela ressemble plus au dénommé « voisinage civil ».
Un exemple significatif fut un Monsieur Ecossais qui déménagea à Manchester où il décéda, étant propriétaire de la seconde collection de timbres la plus importante du monde. Ledit Monsieur, avec le fondement britannique du principe de liberté de tester, octroya un testament de tous ses biens à faveur de l’Association Bénéfique, malgré que la normative écossaise établisse un système de légitimes pour les biens meubles (comme le sont les timbres). Or, les héritiers écossais ont fait valoir que ledit Monsieur maintenait son domicile écossais, puisque ses liens avec l’Ecosse n’était pas rompu et ils démontrèrent que celui-ci continuait de boire du whisky écossais, qu’il était associé membre d’un club de football écossais, qu´il continuait de lire tout les jours les journaux écossais, c’est-à-dire, qu’ils accréditèrent que son lien avec l’Ecosse ne s’était pas rompu, obtenant du Tribunal l’estimation de leur réclamation comme héritiers.
1.4) Le nouveau Règlement vient à établir dorénavant le « principe d’unité de la succession », c’est-à-dire, à la succession mortis causa s’appliquera la même Loi, unifiant ainsi les diverses normes de conflits en matière de succession établis par les Etats.
Nous soulignons que le Royaume Unis, l’Irlande et le Danemark n’ont pas participé dans l’adoption du Règlement, et ne sont pas liés à lui, ni assujettis à son application, cependant, cela n’empêche pas les Autorités des Etats membres d’appliquer celui-ci à la succession d’un national du Royaume Unis, d’Irlande et du Danemark, comme à tout autre Etat non membre.
1.5) Avant de commencer avec l’analyse de la régulation contenu dans ledit Règlement, nous exposerons brièvement la situation existante avant le 17 août 2015, date à laquelle commence l’application de celui-ci.
2) Situation avant le 17 août 2015.-
2.1) Que se passe t’il quand un étranger, ayant des biens en Espagne, meurt ?
Conformément à l’article 9.8 du Code Civil Espagnol, à son héritage sera appliquée sa Loi national, c’est-à-dire, celle de sa nationalité.
2.2) Ceci a engendré quelque problème, spécialement quand le défunt était britannique.
Selon la Loi Espagnole, à son héritage sa Loi nationale serait appliqué, c’est-à-dire, la Loi Anglaise (connu comme la figure « renvoi »), néanmoins la Loi Anglaise, étant celle lié à l’immeuble en Espagne, considère que la Loi applicable serait l’Espagnole (connu comme la figure « renvoi de retour »).
C’est-à-dire, le défunt britannique, malgré l’octroi d’un testament basé sur le principe anglais de liberté de tester, se trouvait dans le secteur d’application de la Loi Espagnole, impliquant l’obligation de respecter le système de légitimes.
2.3) Comment résoudre cette problématique?
La résolution de la Direction Générale du Registre et le Notariat du 13 août 2014 a signalé, pour ce cas de successions anglaises avec des propriétés immobilières en Espagne, que le « renvoi du retour » n’est pas recevable et, par conséquent que la Loi Anglaise serait applicable exclusivement, faute de quoi il se produirait une faille dans le principe d’unité de la succession.
Notre Jurisprudence a également rejeté le “renvoi du retour” de la Loi Anglaise à l’Espagnole dans les cas où peut se produire une fragmentation de la Loi successorale, dans laquelle des biens se régiront par une loi et d’autres par une autre. De manière qu’en refusant le retour, la Loi successorale anglaise sera applicable dans tout les cas.
2.4) Le renvoi du retour est uniquement admis lorsque l’unité de traitement légale de la succession ne se rompt pas, c’est-à-dire, quand un Anglais possède seulement des biens en Espagne. Ce cas, est contemplé dans la Sentence de la Première Chambre Civile du TS du 12 janvier 2015 (Sentence nº490/2014), qui applique à la succession d’un anglais la législation espagnole, en admettant le renvoi du retour puisqu’il ne fragmente pas la succession, du fait est que l’unique bien laissé par le défunt se situe en Espagne.
3) Situation à partir du 17 août 2015. Application du Règlement 650/2012.-
3.1) À partir du 17 août 2015, date de l’entré en vigueur l’application du Règlement, s’établit le « principe d’unité de la succession, c’est-à-dire, à la succession mortis causa s’appliquera toujours la même Loi, indépendamment de la nature des biens et du lieu où ils sont situés, unifiant ainsi les diverses normes de conflit en matière de succession établies par les Etats, comme le stipule l’article 23 du Règlement.
3.2) Selon l’article 21.1 dudit Règlement, qui établit la règle générale, à la succession mortis causa s’appliquera la Loi de la dernière résidence habituelle du défunt, indépendamment de sa nationalité.
La problématique surgit quand la détermination du concept « résidence habituelle », qui peut résulter contraire à la sécurité juridique, puisqu’il ne coïncide pas avec la « résidence fiscal » ou avec « l’inscription », bien qu’ils peuvent être utilisés comme indices pour sa détermination.
Le Règlement ne définit pas le concept de « résidence habituelle », au contraire dans le Considérant 23, il est établit, aux effets de sa détermination, que l’autorité qui connait la succession, procédera à l’évaluation générale des circonstances de la vie du défunt durant les années antérieures au décès et au moment de celui-ci, prenant en considération la duration et la régularité de la présence dans l’Etat, ainsi que les conditions et les motifs de sa présence dans l’Etat, avec l’objectif de mettre à jour un lien étroit et stable avec l’Etat où il réside.
Nous comprenons, que ces effets, peuvent être considérer pertinent dans les circonstances suivantes : avoir une propriété dans ledit Etat, avoir la résidence fiscal, être inscrit, travailler dans ledit pays, avoir des enfants inscris au Collège de l’Etat, etc…, pouvant être une preuve pertinente, l’octroi d’un Acte Notarié de notoriété avec des témoins, pour accréditer ainsi ce lien avec l’Etat de résidence.
3.3) Ladite règle générale a une exception dans son alinéa 2, selon laquelle, la Loi de dernière résidence habituelle ne s’appliquera pas, quand le défunt, au moment du décès, maintenant des liens manifestement plus étroits avec un autre pays distinct de celui de sa résidence habituelle.
Exemple: un national allemand qui déménage en Espagne pour des raisons professionnelles, étant celle-ci sa résidence habituelle, et qui décède en Espagne, mais qui maintien des liens avec l’Allemagne, où il a sa famille, ses biens, etc…, dans ce cas-ci il sera appliqué la Loi Allemande, au lieu de la Loi Espagnole.
Cette exception, qui suppose une flexibilité à la règle générale, peut résulter contraire, à l’occasion, à la sécurité juridique.
3.4.) Finalement, cette règle générale relative à la application de la Loi de la dernière résidence habituelle du défunt, peut être éviter par le défunt, à travers de l’exercice dénommé « professio iuris » ou élection de la Loi applicable à sa succession, qui est prévu dans l’article 22 du Règlement, selon lequel, n’importe quelle personne peut désigner qu’à sa succession lui soit appliqué la Loi de l’Etat de la nationalité qu’il possédait au moment de la réalisation du choix ou au moment de son décès.
Y compris s’il a plusieurs nationalités, il peut choisir l’une d’entre elles.
Ladite élection devra se faire de façon explicite via disposition mortis causa ou devra résulter d’une disposition de ce type.
Par conséquent, pour qu’à l’héritage soit appliqué la Loi de la Nationalité du défunt, il est nécessaire que cela se fasse explicitement dans un testament ou disposition similaire.
3.5) Ceci a une spéciale importance pour les britanniques avec des biens immeubles en Espagne, puisque s’ils désirent qu’à leur héritage soit appliqué la Loi Anglaise, où régit le principe de liberté de tester, au lien de la Loi Espagnole où se régit le système de légitimes, il est souhaitable l’octroi d’un testament où explicitement apparaît son choix, évitant ainsi les futurs problèmes, en plus de que cela accélère et facilite les démarches des héritages.
La même chose peut être utilisée pour les personnes dont la Loi nationale régule le droit de succession de façon la plus en accord et avantageuse avec la liberté de tester, au lieu d’un système de légitimes de la Loi Espagnole, auxquels il est également recommandé l’octroi de testament dans lequel apparaît explicitement l’élection de sa Loi Nationale pour qu’elle régisse son futur héritage.
3.6) En conclusion, nous considérons très souhaitable l’octroi de testament pour toutes personnes étrangères possédant des biens immeubles en Espagne, dans lequel il est indiqué de façon explicite l’application de sa Loi Nationale pour son héritage, afin d’éviter la possible application de la Loi Espagnole, pour être sa résidence habituelle, dans laquelle il faudrait respecter le système de légitimes.
À Marbella, le 9 juillet 2.015.
Pérez de Vargas Abogados